L’écoulement principal de la nappe est orienté parallèlement au Rhin, du Sud vers le Nord. La pente de la surface piézométrique est faible, de l’ordre de 0.1 %. L’eau s’écoule à une faible vitesse, de l’ordre de quelques mètres par jour en moyenne, soit près de 600 m par an. Cependant, du fait de l’hétérogénéité du réservoir, les vitesses de circulation peuvent atteindre localement plusieurs dizaines de mètres par jour avec une variation spatiale importante. En bordure de la nappe, côté alsacien, l’écoulement se fait globalement des Vosges vers l’Est pour converger vers le Rhin.
- Carte kriegée du niveau piézométrique moyen de la nappe (Flèches rouges = direction d’écoulement souterrain) & carte kriegée de l’écart-type des variations piézométriques (assimilable au battement) - Schomburgk et al., 2005
Fonctionnement hydrologique
Le comportement hydrologique de la nappe rhénane n’est pas homogène des Vosges à la Forêt Noire, de Bâle à Lauterbourg. Selon les secteurs, les variations du niveau piézométrique ont pour origine principale, soit les précipitations, soit les échanges avec le Rhin, l’III, et les rivières vosgiennes.
Le régime hydrologique du Rhin dans sa partie amont entre Bâle et Lauterbourg est de type « pluvio-nivo-glaciaire » : hautes eaux estivales entre mai et juillet, étiage entre décembre et mars. Ce régime résulte des conditions climatiques régnant dans la partie alpine de son bassin versant .
Le régime hydrologique de l’III de type pluvial océanique, alimenté par un réseau d’origine vosgienne, est inversé par rapport à celui du Rhin : hautes eaux en hiver et au début du printemps (décembre à mars) et basses eaux en été. Ce régime résulte des conditions climatiques régnant dans la partie alpine de son bassin versant : stocks de neige accumulés l’hiver, de fonte glaciaire et fortes pluies estivales (Moser et Zilliox, 1998). Le régime du Rhin conditionne les oscillations de la nappe phréatique et les inondations en pleine période de végétation.
Un des paysages naturels les plus typiques de la vallée rhénane est constitué par les rieds. L’eau souterraine y joue un rôle primordial. L’alternance de marais, de roseaux, de prairies humides et de bosquets donne à ces milieux une grande diversité de formes et de couleurs. La nappe donne naissance aux sources phréatiques du ried qui alimentent les rivières phréatiques, ou « Brunnenwasser », lesquelles, grâce aux échanges avec la nappe, présentent des débits particulièrement réguliers et une eau à température constante. Le grand Ried ello-rhénan est caractérisé par le plus important réseau de rivières phréatiques d’Europe. L’élévation du niveau d’eau du Rhin canalisé, surtout au niveau des barrages, favorise des infiltrations directes d’eau du fleuve vers la nappe phréatique .
L’Ill, tout au long de son cheminement en plaine d’Alsace, n’a pas une influence homogène sur le comportement de la nappe phréatique . Dans sa partie méridionale, à l’amont de Colmar, elle est en position perchée par rapport à la nappe et perd en moyenne le quart de son débit (Elsass et Rau, 1995, Goeppel et Eichinger, 1997). Elle peut être localement à sec à l’étiage estival.
À l’aval de Colmar, des zones de drainage et d’alimentation se succèdent en fonction de la topographie du sol et des fluctuations piézométriques. Les cours d’eau vosgiens, dans leurs cônes de déjection, alimentent fortement la nappe à leurs débouchés en plaine. Il y a là un remarquable processus de recharge de l’aquifère , beaucoup plus puissant que la seule alimentation due aux précipitations efficaces.
Des niveaux piézométriques sont relevés depuis le début du XXe siècle et de manière plus régulière depuis 1950. Le suivi détaillé de l’évolution des niveaux de la nappe est maintenant effectué à l’aide d’un réseau piézométrique régional (lien vers l’ article Surveillance quantitative de la nappe d’Alsace du SIGES Rhin-Meuse) géré actuellement par l’APRONA, réseau patrimonial de gestion constitué d’environ 168 points d’observation.
Bilan hydrologique
Plusieurs bilans hydrologiques d’ensemble ont été calculés à partir des résultats des simulations issues du Modèle hydrodynamique MoNit, modèle multicouches élaboré dans le cadre du projet transfrontalier de modélisation des nitrates (INTERREG III MoNit) par la LUBW (2002-2006), montrant ainsi l’influence prépondérante des cours d’eau dans le renouvellement des eaux de la nappe.
En situation de moyennes eaux, ce renouvellement a été évalué à 2,7 milliards de m3 par an, sur un volume total estimé entre 40 et 50 milliards de m3, de Bâle à Karlsruhe. Dans ce bilan, les rivières apportent 85 % des eaux infiltrées et reprennent 78 % des eaux drainées ; le cours d’eau principal est le Rhin, qui globalement draine la nappe et représente environ 10 % des apports et 3 % des sorties par les cours d’eau. Par ailleurs les prélèvements par pompage sont importants, atteignant environ 0,5 milliard de m3 par an tant pour les besoins en eau potable que pour les usages agricoles, agroalimentaires et industriels.
- Bilan hydrologique de la plaine du Rhin en situation de moyennes eaux (modèle hydrodynamique transfrontalier issu du projet INTERREG III MoNit - LUBW) - Risler et al., 2006